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Le komankonfeste de la douche froide

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S’exposer volontairement au froid est extrêmement bénéfique à tout point de vue, mais difficile à croire tant que l’on a pas les clefs de la pratique et que l’on ne s’est pas donné la peine de les appliquer, de même que jongler semble complètement impossible pour qui ne s’est pas entraîné assez pour y arriver. Mais par un effort régulier, ce qui paraît un jour inconcevable rentre petit à petit dans la réalité du quotidien, et le froid ne fait pas exception à la règle. Il y a différentes façons de s’y exposer et entre toutes, la douche froide est celle que je recommande le plus chaudement.

douche froide
La forme du pommeau de douche rappelle celle de l'auréole couronnant les saints, et sa fonction celle du baptême qu'ils ont coutume de prodiguer à l'eau fraiche. C'est là un signe flagrant du caractère sacré et miraculeux de la douche froide.

La douche froide cumule énormément d’avantages : écologique, facile à pratiquer, rapide, économique, efficace. D’ailleurs quand on s’y met, on se rend compte qu’il n’y a aucune raison de ne pas la pratiquer. Contrairement aux apparences, elle est en général plus délicate que d’autres pratiques radicales comme le bain de glace, même si les difficultés sont bien évidemment différentes. En effet, le fait d’être à moitié en contact avec de l’eau en mouvement et de l’air plus chaud est finalement plus éprouvant pour le corps que d’être immergé totalement dans un milieu glacial mais statique et uniforme. Mais surtout, la pratique de la douche froide n’est pas un événement extrême et isolé, elle s’inscrit sur la durée, ce qui l’expose inévitablement à des moments de faiblesse. Il est donc important de pratiquer quotidiennement, le matin ou le soir, et de prendre une douche froide quoi qu’il arrive, ne serait-ce que deux secondes. Cette routine est très importante car c’est elle qui nous confronte aux vraies difficultés, qui nous évite la démotivation et qui nous permet ainsi de grandir véritablement. Quand on est en pleine forme, qu’on est heureux ou qu’on est amoureux, c’est facile. Le moment crucial, c’est le jour où on se sent faible, un peu déprimé, voire un peu malade, c’est là que l’on va peiner et c’est d’ailleurs là que le froid va le plus nous apporter. Car oui, il faut oublier tout ses préjugés et faire confiance à son corps, qui est infiniment plus puissant qu’on ne le laisse être. Il n’y a aucun risque de choc thermique ou autre croquemitaine. Dès l’instant que l’on est en état d’allumer le jet d’eau, c’est que le corps est en état de prendre une douche froide. Une partie de vous va essayer de vous convaincre du contraire, mais elle a tort, et c’est précisément d’elle dont vous avez le plus à vous méfier.

La principale difficulté de la douche froide est l’instant la précédant, et son principal adversaire est la partie de l’esprit qui panique dès que l’on sort de l’habitude et du confort. Elle va trouver les raisons les plus biscornus, les plus tarabiscotés pour ne pas y aller. Elle utilise tout ce qu’elle peut contre nous, toutes nos angoisses, surtout celles que l’on soupçonne le moins. Elle est très forte et elle nous connaît très bien, vu que c’est une partie de nous. Il faut tenir bon, entendre toutes les pensées qu’elle génère s’entrechoquer et ne pas les écouter. C’est extrêmement difficile, mais plus cette difficulté est repérée, plus elle vole en éclat. La voix qui dit : “Non pas aujourd’hui, t’es un peu fatigué, un peu malade, en plus t’as pas repris de dessert hier, t’as bien mérité un bonne douche chaude, en plus machin a pas été sympa avec toi, etc...“, il faut se rendre compte que ça n’est pas vraiment nous et la dissocier de notre être, car c’est un parasite nuisible. Le problème, c’est que l’éradiquer est presque impossible, c’est le travail de toute une vie, car cette petite voix n’est rien d’autre que la peur de la mort. On a pris l’habitude de l’écouter alors on pense qu’elle nous est vitale. Mais c’est faux. Et la douche froide est un formidable outil pour s’en convaincre. En y prêtant un peu attention, on va se rendre compte qu’elle a toujours le même discours, tout les jours, en toute situation, et si elle semble plus forte les jours de faiblesse, ça n’est pas qu’elle est d’un coup plus légitime, c’est que la faiblesse consiste justement à lui donner plus de crédit. C’est un des drames de la condition humaine : que l’on soit un débutant ou un cador de la douche froide, cette voix est toujours là ! Toujours ! Evidemment, elle évolue, parfois elle disparaît pour un temps, mais elle reste tapie dans l’ombre attendant pour son retour un nouveau moment de faiblesse, c’est à dire précisément le moment où l’on a l’orgueil de penser qu’on l’a éliminé.

Se rendre compte de cette réalité est vraiment le plus gros du boulot, car il ne suffit pas de le comprendre intellectuellement, il s’agit de le vivre et seules la pratique et l’action sont capables d’un tel enseignement. J’insiste car cette même voix va essayer d’utiliser la compréhension intellectuelle et l'orgueil qu’elle suscite à son avantage. Par un phénomène mystérieux, l’esprit ne tient jamais rigueur à cette voix pour les innombrables fois où elle a tort, mais va se souvenir à vie de la fois où par malheur et par une situation exceptionnelle elle avait raison, alors que ça n’est que fortuit vu qu’elle dit toujours la même chose, comme un prophète qui annonce la fin du monde tous les jours, et qui exulte triomphant le jour où cela arrive par un hasard qu’il ne maîtrise aucunement, voire qu’il a lui même provoqué par son pessimisme toxique. Ces considérations sont relativement générale et ne concernent finalement pas uniquement la relation au froid, mais la douche froide est un moyen formidable d’évoluer à ce niveau et surtout de mesurer son évolution. Car si prendre une douche froide tous les jours aide à comprendre cette idée, c’est aussi cette compréhension qui permet de profiter pleinement de la douche froide. Il y a ainsi une interdépendance entre l’action concrète et le principe abstrait, les deux se nourrissant mutuellement des progrès de l’autre. Il ne faut donc pas espérer griller les étapes et réussir à tout appliquer immédiatement, mais plutôt laisser les deux se faire la courte échelle pour franchir à leur rythme le mur de nos angoisses.

Ceci étant dit, passons maintenant à la douche froide à proprement parler. Il suffit de rentrer dans la douche et mettre le thermostat au minimum, et pas presque au minimum. Pas de compromis. C’est toujours la petite voix qui demandent le compromis, c’est encore un piège, elle essaye encore de gratter ce qu’elle peut ; la vigilance doit être permanente. Ensuite, mettre le jet au maximum, et pas presque au maximum. L’eau coule au sol, on respire calmement et sans hésiter on y va, on se met le jet dessus, tranquillement, sans se presser mais sans ralentir, en se concentrant sur le calme de la respiration, en essayant d’accueillir le froid sans le fuir. Tout mouvement de recul, même incontrôlé, même non assumé, est une fuite, un refus du froid. Il n’y a aucun problème à ne pas réussir à accepter le froid dès le début, c’est normal et instinctif, mais il s’agit de le voir comme tel et pas autrement. Cela ne sert à rien de tricher et de se mentir à soi-même avec des excuses, personne ne regarde, personne ne juge, on est seul avec notre conscience, qui observe et souffre en silence au moindre de nos mensonges. Au contact de l’eau, le corps tressaille et la respiration s’active. C’est normal. Par un phénomène similaire à la formation de la glace, le froid cristallise la peur et les tensions présentes dans le corps. Ainsi, cette réaction ne vient que de nous, pas du froid. Le corps n’a fondamentalement aucune raison de tressaillir. Il va très bien, et ce mouvement ne l’aide pas, tout au contraire, de même qu’il est parfaitement inutile de serrer les mâchoires en période de stress et de transpirer lors d’un oral. C’est simplement l’effet de la confrontation (au froid) que de dévoiler les peur et les tensions. La réaction est directement proportionnelle à l’appréhension qu’on en a, et doit ainsi être considérée comme un indicateur plus que comme un ennemi à éliminer. Il ne s’agit pas de la réprimer artificiellement, mais d’atteindre le stade où elle n’est naturellement plus là ce qui, encore une fois, ne vient pas en un jour. Au début, elle semble insurmontable et inévitable, mais petit à petit elle va s’amoindrir jusqu’à potentiellement disparaître complètement quand la peur n’est plus là. Et comme cette réaction ne ment jamais, contrairement aux pensées et à l’orgueil, on sait alors que l’on a fait du chemin.

Revenons à la douche, nous venons de nous passer le jet d’eau sur le corps. Peu importe les réactions qui arrivent, il faut accepter ce qui vient. La seule chose à garder en tête, c’est que l’on est, à tout instant, en train de choisir entre accepter et refuser le froid et que la teneur de l’expérience dans son intégralité va découler de ce choix, qui n’est évidemment pas mental mais fait avec l’être en entier. Refuser le froid conduit à lutter, à trembler, à souffrir, voire à paniquer et à se mettre en danger. Accepter le froid amène au calme et au bien-être, mais c’est paradoxalement moins naturel parce qu’on a l'habitude de faire le contraire et surtout parce que nos peurs veulent nous en empêcher. C’est extrêmement similaire à s’efforcer de trouver l’équilibre sur un fil de fer avec des adversaires - nos peurs - en train de souffler de toute leur force pour nous déséquilibrer. Nos seules alliées dans cette épreuve sont la sensation et la respiration, et c’est vers elles qu’il faut se tourner dès que l’on se sent chavirer. Il faut alors sentir le froid, la sensation pure de froid et la laisser être, se rendre compte qu’elle n’est pas désagréable, au contraire. Il faut l’embrasser, prendre ce qu’elle nous donne, c’est à dire un calme profond, et en même temps chercher ce calme, en particulier dans la respiration. Il ne s’agit pas de l’accentuer, ni de la contrôler. Il ne s’agit pas non plus de se concentrer dessus, mais de se concentrer à la laisser être, paisible et profonde, comme si on était dans son lit, alors qu’il semble que tout autour essaie de nous détourner de cet objectif. La respiration est cruciale, mais elle ne fait pas entièrement tout et je ne peux malheureusement pas en dire plus. Le reste, il faut le trouver par soi-même, car chacun a ses propres démons à combattre. Mais il est clair qu’en appliquant tout ce qui précède, les solutions manquantes apparaissent d’elles-mêmes et guident vers l’acceptation du froid. Et en l’acceptant, il commence à agir. Il fait disparaître la tension, l’esprit se concentre sur l’instant présent, reste tranquille, la petite voix disparaît sans que l’on ne s’en rende compte vu que l’attention est pleinement sur l’instant présent. On passe alors, à notre grande surprise, un bon moment et on reste plus longtemps que l’on ne l’aurait jamais imaginé. Mais la durée de la douche importe peu, ce qui compte c’est de ne pas se mentir à soi-même quant aux raisons qui nous poussent à sortir. Il arrive fréquemment que, malgré le bien-être, la petite voix surgisse et dise “C’est bon là, t’es peut-être bien, mais ça commence à bien faire, c’est pas normal, on ne sait jamais, il est temps de sortir” et qu’elle se fasse écouter. Ainsi, il peut être bon au début de se fixer des objectifs, pour s’aider à vaincre ses peurs quand on sent qu’elles nous coincent.

Voilà les principales clefs pour aborder sereinement la douche froide et profiter de ses bienfaits. Avant de laisser place à la pratique, quelques derniers petit détails : Premièrement, si on est tous égaux face au froid, on ne l’est pas tous face à la température. Il ne s’agit surtout pas de se faire violence ni de prouver quoique ce soit aux autres mais de progresser petit à petit pour soi-même et de tendre vers cet idéal de sérénité, que l’on atteint plus rapidement que l’on ne le pense. Si attaquer directement par le froid est trop dur au début, on peut commencer par une douche chaude et descendre la température au bout d’un moment. L’inverse marche aussi. On peut commencer par le froid en se promettant une douche chaude après, ce qui aide considérablement à se motiver. Le plus important est l'honnêteté et la bienveillance que l’on a envers soi-même, la confiance en son objectif et la vigilance vis-à-vis de la petite voix, qu’il faut sans cesse chercher à dissocier pour éviter autant que possible de s’emprisonner à nouveau dans les zones de confort que fabriquent perpétuellement nos angoisses, de même que le plus dur dans la traversée du désert n’est pas d’atteindre une oasis, mais de ne pas s’y établir. Deuxièmement, à la sortie de la douche, le corps est un peu refroidi. Cela se sent en général au bout de quelques minutes ; c’est la douche froide qui continue : ce qui est valable pendant l’est toujours. Il s’agit de continuer à accepter le froid. Mettre beaucoup de vêtements chauds peut sembler être une bonne idée, mais cela revient à refuser le froid et transformer ce moment en une torture qui paraît interminable. Mieux vaut s’habiller normalement, en s’efforçant de rester autant que possible dans l’espace de conscience amorcé par la douche froide, et d’accepter les éventuels désagrément qui surgissent. Enfin, si les limites du corps sont bien plus lointaines que celles du mental, elles existent néanmoins. Il ne s’agit pas de les nier, mais d’arriver à les identifier et les dissocier de la fameuse petite voix. Il faut pour cela se demander honnêtement à chaque nouvelle intention si elle part d’une envie, d’une peur ou d’un besoin ; questions dont seule la conscience a la réponse. En tout cas, il est extrêmement rare d’arriver aux limites du corps et dans le cas de la douche froide, on peut être certain de ne jamais les atteindre. En cas de doute, si l’on sent le moindre conflit interne, dans un sens comme dans l’autre d’ailleurs, c’est qu’il y a une peur dans l’équation. La voix du corps s’exprime avec moins de décibel mais elle a un accent que celle de la peur ne saura jamais imiter, celui de la paix et de la sérénité.

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